Entre 2011 et 2019, j’ai travaillé sur un doctorat interuniversitaire en histoire de l’art. Je place ici le brouillon de ma thèse. Vous pouvez consulter le plan complet du projet et une description de mon parcours. N’oubliez pas qu’il s’agit d’un brouillon.


1.4 Méthodologie – Sources

Le principal lieu de conservation des archives de l’AAM se trouve au Musée des beaux-arts de Montréal. Les sources primaires que nous y avons consultées sont nombreuses. D’abord, les catalogues des expositions composant notre corpus s’y retrouvent tous, à l’exception du premier événement en 1860. Ces documents contiennent le titre des œuvres, l’artiste associé et, dans la plupart des cas, le nom de la personne ayant réalisé le prêt. Ils contiennent également de nombreuses informations supplémentaires dont, parfois, des textes introductifs et des publicités.

Cette information est complétée par l’existence de registres. Ces grands cahiers permettaient aux administrateurs de consigner les œuvres exposées, le nom et l’adresse des propriétaires, la valeur d’assurance et les dates de réception et de retour. De plus, lors d’une vente, le nom de la personne ayant réalisé l’acquisition était également inscrit. Le croisement de ces informations avec celles publiées dans les catalogues permet des recoupements supplémentaires puisque le contenu varie légèrement entre ces deux sources1. Enfin, notons que le premier registre (1860-1879) est introuvable. Ce précieux document est peut-être détruit ou égaré.

Durant la période étudiée, l’AAM a produit quelques documents officiels. Parmi ceux-ci, les rapports annuels forment l’ensemble le plus important. Les expositions organisées par l’association y sont présentées. Ainsi, chaque événement est accompagné d’une note explicative, de données sur les œuvres présentées ainsi que de statistiques de fréquentation. Les autres activités sont également décrites dont les cours artistiques et les conférences. Du côté de la bibliothèque, les nouvelles acquisitions sont présentées. Une liste des abonnements aux périodiques est publiée. Les statistiques sur le nombre de membres actifs sont compilées ainsi que la composition du conseil d’administration. Enfin, le bilan financier est rendu disponible. Cette source nous servira à situer les expositions d’œuvres prêtées parmi l’ensemble des activités de l’AAM. Fait à noter, ces documents ne sont disponibles qu’à partir de l’année 18802.

Les différentes réunions tenues par l’AAM ont laissé des traces. Les membres du conseil d’administration ont rédigé des procès-verbaux de leurs réunions annuelles. Ces témoignages existent pour l’ensemble de la durée de notre étude. À l’occasion, d’autres rencontres étaient organisées. Nommées « Council Meetings », elles sont documentées pour la période comprise entre 1895 et 1925. S’y ajoutent les différents comités mis en place au fil des ans. Leur liste est importante. Sans tous les citer, mentionnons qu’il en existe pour la sélection des œuvres à exposer (« Art Gallery Committee »), la loterie artistique (« Art Union Committee »), les finances (« Finance and House Committee »), la bibliothèque (« Education and Library Committee »), les conférences (« Lectures and Entertainment Committee ») et l’agrandissement (« Building Committee »). Les deux volumes conservés aux archives du Musée des beaux-arts de Montréal sont fragmentaires. Le premier débute en 1879 pour se terminer en 1892. Le second est concerné par les années situées entre 1901 et 1922.

Parmi les autres sources primaires, la volumineuse correspondance de l’AAM est consultable par le biais des copies au carbone. Cinq volumes concernent la période à l’étude. De très nombreuses lettres sont factuelles et traitent des aspects pratiques de l’association dont le paiement des factures. Lorsque des œuvres sont mentionnées, elles ne le sont souvent que d’une façon rapide. Le recours à ces documents demeure ponctuel. Sur le plan visuel, les archives du Musée des beaux-arts de Montréal conserve quelques photographies des expositions de notre corpus. Elles sont regroupées au sein d’un cartable intitulé « Art Association of Montreal. Album of Photos ».

L’AAM a produit cinq spicilèges entre 1864 et 1929. Ces recueils contiennent surtout des coupures de presse liées aux expositions, des exemples des publicités parues dans les journaux et des articles généraux sur l’art. Différents documents d’époque les complètent, allant de la carte de membre à la sollicitation d’œuvres par les autres institutions artistiques. Trois remarques doivent être énoncées à l’égard de cette source. D’abord, plusieurs documents en ont été retirés afin d’être classés parmi les archives permanentes. Nous les avons consultés dans le cadre de cette thèse. Ensuite, la numérisation de ces coupures de presse permet une consultation rapide et efficace. Toutefois, l’identification de la source est inscrite manuellement. En conséquence, de nombreuses imprécisions sont parfois à signaler. Ce constat est important durant la période étudiée alors que la presse tente plusieurs expériences. À titre d’exemple, le Witness possède des éditions hebdomadaire, bihebdomadaire et quotidienne à divers moments entre 1860 et 1914. S’y ajoutent des suppléments mensuels et des séries spéciales. Ainsi, l’identification d’une coupure de presse de ce quotidien dans les spicilèges ne fait pas de distinction entre ces éditions. Dans la mesure du possible, nous avons tenté de supprimer cette imprécision. Toutefois, il n’a pas toujours été possible d’y arriver et, dans ce cas, nous présentons l’information la moins imprécise possible. Enfin, et d’une manière plus problématique, les coupures de presse qui y sont recueillies doivent être comprises comme étant orientées idéologiquement. Les prises de position négatives y sont peu recensées. En conséquence, ils ne peuvent être considérés comme des sources neutres. Un travail auprès de l’ensemble de la presse sera requis autour de certaines questions précises.

Afin de documenter la constitution de la collection permanente de l’AAM, deux sources primaires ont été consultées. La première, déjà citée, concerne les rapports annuels de l’association. La seconde est un document compilant les fiches des œuvres vendues, perdues ou volées intitulé « Sales and Exchanges of Paintings and Sculptures ». Chaque œuvre référencée indique son titre et le nom de l’artiste. Une courte description et un historique suivent. L’entrée dans la collection est décrite ainsi que le moment de sa sortie. À cette source primaire s’ajoute un travail de compilation réalisé par le service des archives à notre demande. Cette recension permet d’identifier toutes les œuvres entrées dans la collection actuelle du Musée des beaux-arts de Montréal avant 1914. Le croisement de ces deux sources permet de tracer un historique de la collection permanente de l’AAM.

Également, nous avons consulté des archives de collectionneurs. Ainsi, la compréhension de la collection de sir William van Horne passe par ces archives qui en fournissent un important instantané au moment du legs d’Adeline van Horne à l’AAM en 1945. Outre les documents juridiques, elles contiennent catalogues, correspondances et photographies qui permettent de préciser les œuvres incluses dans le corpus. D’une manière similaire, le testament de Benaiah Gibb précisant son legs de 1877 et celui du docteur William Gardner ont été étudiés.

D’autres sources primaires ont été consultées d’une manière ponctuelle. À titre d’exemple, citons la correspondance d’August F. Jaccaci. En 1903, il débute le travail son livre intitulé Noteworthy Paintings in Private American Collections3. Aidé du peintre John La Farge, l’ambition consiste à cataloguer les œuvres considérées comme étant importantes et conservées en mains privées en Amérique du Nord. Quinze volumes sont prévus à l’origine, mais seulement le premier a été publié en 1907. Les archives associées à ce travail sont conservées au Smithsonian Institute of American Art sous l’intitulé « The August Jaccaci Papers ». Si une partie d’entre elles ont été numérisées, la plupart ne sont accessibles que sur place par l’intermédiaire des microfilms. Heureusement, l’institution a accepté de faire voyager ces documents jusqu’à nous. En les dépouillant systématiquement, nous avons pu identifier des correspondances entre l’auteur et des Montréalais, dont Richard B. Angus et sir William van Horne.

Ainsi, les sources secondaires appuient et complètent les informations fournies par le travail dans les archives. Parmi les plus importantes, citons la presse locale et étrangère4. La période que nous étudions a vu l’apparition des catalogues raisonnés. Certaines œuvres exposées à Montréal se retrouvent dans ces inventaires. Ainsi, celles associées à Rembrandt van Rijn sont-elles inscrites dans l’étude que Hofstede de Groot consacre aux artistes hollandais au début du XXe siècle5. D’autres initiatives moins rigoureuses voient également le jour à la fin du XIXe siècle. Dans ce lot, citons Art Treasures of America par Earl Shinn publié en trois volumes entre 1879 et 18826. Dans ce document édité sous le pseudonyme d’Edward Strahan, l’auteur présente diverses collections dignes de mention en Amérique du Nord. Le deuxième volume détaille les œuvres de sir George A. Drummond et complète notre documentation.

L’information sur les collections montréalaises étant disséminée dans plusieurs publications, nous renvoyons le lecteur ou la lectrice à la bibliographie à la fin de cette thèse pour la liste complète des documents consultés. Toutefois, ce survol permet de mettre en relief cette richesse documentaire. En ce sens, il nous importe d’insister sur le travail précurseur réalisé par Janet M. Brooke en 1989. Brièvement mentionné dans le cadre du bilan historiographique, l’inventaire complétant la publication Le Goût de l’art. Les collectionneurs montréalais. 1880-1920 forme une première compilation des œuvres et personnes citées au sein de notre corpus. Toutefois, plutôt que de nous appuyer sur ce travail, nous avons réalisé notre propre compilation à partir des sources mentionnées. En conséquence, notre compilation et celle de l’historienne de l’art diffèrent par moments. En particulier, notre intérêt dépasse largement sa question centrée sur les collections montréalaises de peinture européenne entre 1880 et 1920. En questionnant la place des « Loan Exhibition » au sein de l’AAM, nous abordons des sources similaires avec une perspective différente.

Outre Janet M. Brooke, il convient de citer le travail d’Hélène Sicotte comme source sur laquelle cette thèse s’est appuyée. En particulier, sa thèse de doctorat sur les activités du marchand d’art Scott & Sons défend l’idée d’une spécialisation artistique durant la période qui nous concerne7. Soutenue en 2003 à l’Université du Québec à Montréal, elle est accompagnée par une précieuse liste des expositions organisées dans la métropole canadienne entre 1860 et 1914. Complété par nos recherches, cet important travail nous permett de situer les activités de l’AAM dans le milieu montréalais.

À ces sources s’ajoutent les très nombreux catalogues d’exposition, publications, études et essais que nous avons consultés. En conservant notre corpus au centre de nos interrogations, nous avons pu rassembler un nombre considérable d’informations sur les acteurs impliqués dans les « Loan Exhibitions ». Afin d’organiser ce contenu, nous avons eu recours à certains outils numériques.


1 À titre d’exemple, citons l’année 1891. À cette occasion, les registres oublient la présence de trois œuvres mentionnées dans le catalogue. Ainsi, la firme Cottier & Co. de New York a-t-elle prêté à cette occasion la peinture Rêverie de Gustave Courbet et le pastel Tiger Drinking de John Swan ? Pour sa part. le marchand montréalais Scott & Sons a-t-il soumis The Vision of the White Lady par John Pettie ? À l’inverse, les registres inscrivent des œuvres de George Innes, Hendrik Willem Mesdag et Albert P. Ryder absentes du catalogue. Lorsque de telles situations se sont présentées, nous avons consulté la presse afin de tenter d’en relever la présence réelle.

2 Un document préparé par Juanita Toupin par le service des Archives du MBAM tente de reconstituer la chronologie administrative de l’AAM avant 1880. Il croise les autres sources que nous avons consultées. Nous y référons au besoin.

3 August F. Jaccaci et John LaFarge, Noteworthy Paintings in American Private Collections, New York, Garland, 1907.

4 À titre d’exemple, citons le Burlington Magazine auquel est associé sir William van Horne entre 1905 et 1915.

5 Cornelis Hofstede de Groot, A Catalogue Raisonné of the Works of the Most Eminent Dutch Painters of the Seventeenth Century, 6 volumes, Londres, MacMillan, 1908-1916.

6 Earl Shinn, Art Treasures of America, Philadelphie, Barrie, 1879-1882.

7 Hélène Sicotte, « L’implantation de la galerie d’art à Montréal : le cas de W. Scott & Sons, 1859-1914. Comment la révision du concept d’œuvre d’art autorisa la spécialisation du commerce d’art », 2 volumes, thèse de doctorat, Montréal, Université du Québec à Montréal, juillet 2003.